Si, bien sûr. Mais il faut se rappeler que le rite de l’Eucharistie a été institué par Jésus lui-même, au temps de la fin de sa vie terrestre. Pour l’essentiel, il est donc d’institution divine. D’autres éléments peuvent être d’institution apostolique, et leur origine se perd dans la nuit des temps, comme c’est le cas pour les prières du canon. D’autres éléments sont dus à l’inspiration de saints pontifes, ou même à l’ancienne prière nationale de Rome. Ces éléments ont été transmis au cours des siècles. L’Esprit saint a fait son œuvre : une Providence toute spéciale garantit la prière publique de l’Eglise contre toute corruption ; sous cette protection, les éléments sanctificateurs ont perduré, les autres, moins parfaits, ont disparu au fur et à mesure.

Mais cette transmission et les modifications des parties sujettes au changement se sont toujours faites sans corruption du sacré ou de la doctrine exprimée, et dans le sens d’un approfondissement ou d’un enrichissement de cette doctrine. Ainsi, une meilleure compréhension de l’aspect sacré du repas eucharistique a rapidement conduit les apôtres à le séparer des repas fraternels, ou agapes, que les premiers chrétiens organisaient en même temps que la célébration liturgique. De même, une meilleure connaissance de la présence réelle du Christ dans l’hostie a conduit à renoncer, progressivement, à la communion dans la main. L’antiquité vénérable des prières de la messe nous unit dans la prière aux chrétiens de tous les siècles, jusqu’au Christ même.

Le culte s’organise et se développe selon les circonstances et les besoins des chrétiens, il s’enrichit de nouveaux rites, de nouvelles cérémonies et de nouvelles formules, toujours dans le but que nous tirions enseignement de ces signes extérieurs, que nous prenions conscience de nos progrès et que nous nous stimulions fortement à les poursuivre —, car la valeur du résultat dépendra de la ferveur qui l’aura précédé.
Pie XII, Mediator Dei

La liturgie comporte une partie immuable, d’institution divine, et des parties sujettes au changement, qui peuvent varier au cours des âges et même le doivent s’il s’y est introduit des éléments qui correspondent mal à la nature de la liturgie elle-même.

Concile Vatican II, Sacrosanctum concilium

Cette fixité des parties essentielles de la liturgie est également garante de la véritable liberté des fidèles : grâce à elle, ils seront sûrs de ne pas être livrés à quelque invention d’un individu ou d’un groupe, mais de rencontrer ce qui oblige aussi bien leur curé ou leur évêque que le pape, et leur donne à tous la possibilité d’user de leur liberté pour s’approprier personnellement le mystère qui nous est destiné à tous.
Cardinal Joseph Ratzinger (préfet de la Congrégation pour la doctrine de la foi), La célébration de la foi

Les papes jusqu’à Paul VI n’ont pas apporté de modifications à l’ordinaire de la messe proprement dit, alors qu’après le concile de Trente tout particulièrement, ils ont introduit de nouveaux propres pour de nouvelles fêtes.
Mgr Klaus Gamber (directeur de l’Institut liturgique de Ratisbonne), La réforme liturgique en question